Nos noëls ( âmes sensibles s’abstenir)

Aujourd’hui, c’est Noël.
Il fait très beau.
Hier soir, avec mes enfants , nous avons soupé ensemble.
Mhhh, la bourguignonne…m
J’ai fait un écart dans mon régime végétarien.
Une fois par année, pour les fêtes.
Mon estomac me le fait payer.
Je ne suis plus habituée à digérer la viande.
Ce matin du 25, je me réveille, je vois les gentils messages qui m’arrivent.
Parmi eux, il y en a un qui me bouleverse.
C’est mon ami J.
Mon ami J a été expulsé de Suisse.
Pour des raisons qui me semblent incompréhensibles, tant la punition est grave
par rapport aux actions qu’il a commis dans sa jeunesse.

Il a fait ce qu’il a pu pour se défendre, pour se rattraper.
Mais, sans vous raconter sa vie, il a subi une série d’événements traumatiques, dont un seul suffirait à anéantir quelqu’un.
Se défendre quand on est déjà à terre, je connais ça, c’est impossible.
Au contraire, quand on ne fait qu’en rajouter dans le malheur, par ce que c’est tout ce qu’on connaît.

Quand je repense à mon propre parcours, je me vois comme une miraculée.
Je ne saurais même pas dire comment j’ai pu m’extirper de ce cercle vicieux qui me ramenait sans cesse au fonds du gouffre.
Quand je vois ce que subit J. j’ai envie de reprendre mes études, pour devenir avocate et défendre les gens comme lui.
Je suis révoltée.

Aujourd’hui nous avons la chance d’avoir des téléphones portales.
Et Whatsap.
ce qui me permets de communiquer avec mon ami.
Parlons un peu de lui.
J.

Il me manque.
Je pouvais toujours compter sur lui pour m’aider avec mes plantes.
quand il avait une minute, il nettoyait ma terrasse de ses feuilles mortes, sans que j’aie besoin de demander.
D’ailleurs, je ne l’aurais pas fait.
Je le revois encore, malgré son opération récente d’une hernie,
se battre avec mon gigantesque Yucca, pour le rempoter…
Curieux garçon mon ami J.
Avec son humour si décapant, que parfois, je devais le freiner un peu.
Aujourd’hui, son humour est relégué si loin dans sa tête, qu’on pourrait le croire disparu.
Mais comment garder le sens de l’humour dans une situation aussi épouvantable.
A cause de son état de santé, J. n’aurait jamais du partir.

Ceux qui pensent qu’on expulse pas les gens malades sont bien naïfs.
J. est atteint dans tout son être.
Physiquement et moralement.
Il vivait depuis des années sous la menace de cette expulsion insensée.
Jamais tranquille, jamais apaisé.
Naïve que j’étais, je croyais ça impossible.
Mobiliser les ressources de la Confédération pour les erreurs de jeunesse d’un homme malade, qui a fait toute sa vie ici ?
Parce qu’il est étranger.
Parce qu’l y a une loi pour ça.
Une loi étrange qui en épargne certains bien plus dangereux et se rabat sur les plus faibles.
Renvoyer quelqu’un dans un pays inconnu, avec une langue inconnue,
un pays avec un système de santé inexistant, donc aucun moyen de poursuivre ses traitements…
Ou alors cher, très cher.

Une boite de médicament qui coute 20rs ici, est.. 3000 frs là bas.
Impossible ?
Eh si.

Avec tant de corruptions et d’injustices, que même si j’avais les moyens de l’aider, je sais qu’il y a peu de chance que l’argent ou quoi que ce soit d’autres,
lui parvienne vraiment.
Mais ce n’est pas le pire.

On peut difficilement imaginer, nous qui vivons en Suisse,
qu’un centre de soin puisse appliquer la torture.
A moins de croire que c’est un film.
Tout est possible dans un film.
Sauf que le héros, là, est dans la réalité.
Que c’est mon ami J, et pas Antonio Banderas.
Mon ami qui est plutôt fluet, avec ses lunettes,
et surtout extrêmement affaibli par la maladie.
Ses premiers ennemis sont les patients de ce centre de soin immonde.
Des hommes grossiers et agressifs qui se moquent de lui quand ils ne tentent pas de l’agresser physiquement.
Juste pour passer le temps.
Vous croyez que j’exagère ?
vous n’avez rien vu encore.
Il y a ce qu’ils appellent le cercle.

Quand un patient, je dis bien un patient, je rapelle qu’il s’agit d’un centre de soin, et parait-il pas le pire.
Quand un patient commet une infraction au réglement du centre, il est puni.
Puni par les autres patients.
Alors qu’il est déjà très malade, on le mets
au centre du cercle constitué des autres patients.
Ensuite, au moyen d’un tuyau d’eau froide, on le frappe et au moyen du jet violent,

on le lave de ses pêchés.

Quand il me raconte ça, mon ami est en larme.
Il n’a pas le droit de téléphoner plus d’une heure par jour , mais il réussi à me mettre des messages vocaux.
Et quand je peux le voir, amaigri, avec sur le visage une expression de stupeur et de souffrance.
mon coeur est en miettes
Il ne se plaint pas, il n’a pas la force pour ça.il raconte seulement.
Il me remercie de le soutenir
Comme si il ne le méritait pas, tant il est rabaissé par ce qu’il subit.

Si je tiens à témoigner à sa place aujourd’hui, c’est parce que c’est trop lourd à porter toute seule, une histoire pareille.
J’espère que parmi vous, certain auront de la compassion.
Dans ce jour de Noël de partage et de cadeaux.
C’est le seul que je désire.
De la compassion pour ceux qui souffrent.
Nous en avons tous autour de nous.
Avoir de la compassion fait plus de bien que tout l’argent du monde.
donner de l’argent à quelqu’un en ajoutant son mépris, c’est comme brûler ce qu’on vient d’offrir.

Il existe de rares personne capables d’aider sans juger.
J’en connais.
Si je suis là aujourd’hui, si je peux raconter un peu l’histoire de J. c’est grâce à ses personnes et à l’amour que je reçois de mes proches.

Je vois encore des gens s’imaginer qu’à eux, il ne peut rien arriver.
Ils ne se mettront jamais dans cette position.
C’est oublier que les épreuves, comme la pluie, s’abattent sur tout le monde.

Pour terminer sur une note positive, je crois en nos pouvoirs de pensées positives.
Que ce soit en prières à qui vous voudrez, ou en simples pensées bienveillantes,
je veux croire que nous pouvons améliorer les choses.
En tout cas ça ne coûte rien d’essayer.

Je vous remercie de m’avoir lu jusqu’au bout.
Que malgré tout nos Noëls soient joyeux.
Parce que déprimer à la place des autres qui souffrent ne sert à rien.
Mais si on reste fort et joyeux, alors on peut soutenir ceux qui en ont besoin.
Avec nos sourires et nos pensées d’amour.

Voilà mon Noël

Facebook
Twitter
Email
WhatsApp

Laisser un commentaire