Journal Biennois d’une pandémie Jour 9 Un autre monde

Nous sommes trop pressé.

Si il y a bien quelque chose qui me semble évident, c’est ça.

On va trop vite.

On à tellement à faire dans une seule petite journée qu’on en oublie l’essentiel.

Et voilà que soudain, le monde tourne au ralenti.

Cloîtré chez nous, nous voilà obligé de prendre notre temps.

Aujourd’hui, au 9 ième jour, il ne fait pas très beau.

Du coup, pas ou peu de rassemblement, en tout cas rien de visible.

Au bord du lac, la police fait des rondes .

On sent qu’il y a du changement.

Le bandeau qui défile sous nos émissions à la télé nous répète inlassablement de rester chez nous.

J’ai du sortir quand même aujourd’hui, pour acheter un thermomètre.

Enfin, pour essayer d’acheter un thermomètre…

Pénurie…

A la pharmacie de la gare, les vendeuses ne sont pas très sympas.

C’est drôle, comme le monde tourne à l’envers…

D’habitude, elles sont plutôt impliquées, mais là, on dirait qu’elles n’ont pas envie que je sois là, ni d’être là elles -mêmes d’ailleurs.

Il est bien possible qu’elles en aient marre ,.

Possible que les clients ne soient pas faciles non plus.

A force de dire qu’elles n’ont ni masque, ni thermomètre…

et de se ramasser la mauvaise humeur des gens…

Dans toutes les Coop où j’ai mes habitudes l’ambiance est toujours aussi décontractée.

A la gare, le grand type qui vous force littéralement à vous désinfecter les mains à l’entrée, prends des airs de dur, mais il rigole juste après.

Il nous distribue des numéro plastifiés, qu’on doit rendre à la sortie.

Comme ils ne se suivent pas, je ne comprends pas bien le but de la manoeuvre.

C’est une situation tellement hallucinante.

J’ai de la chance, d’avoir des magasins si proche de chez moi.

Tout le monde n’a pas la possibilité de faire de grandes commissions.

Tenez, une personne âgée par exemple, avec peu de moyens.

Qui n’a ni voiture , ni personne pour l’aider.

Ramener , ne serait-ce qu’une bouteille d’eau minéral et un litre de lait, c’est déjà lourd…

Nous sommes une ville ou beaucoup de personnes sont pauvres et doivent se contenter de petits moyens qu’elles reçoivent par mois, voir par semaine.

Il y a des personnes si seules que les rares contacts qu’elles ont dans la journée sont ceux  qu’elles ont avec les vendeuses justement.

On sous-estime le rôle des vendeuses dans notre société.

Même si ce n’est pas leur travail de faire du social, le sourire qu’elles offre ou pas compte bien plus qu’on peut l’imaginer.

Toutes les vendeuses connaissent au moins une mamie qui vient tout les jours et qui n’a pas l’air de comprendre qu’il y a d’autres clients dont il faut s’occuper.

Et puis il y en a d’autres qui pensent à vous amener une petite boîte de chocolat

à Noêl, et ça vous remonte le moral dans une dure journée.

Les vendeuses ont des dures journées.

Je discute là.. mais aujourd’hui j’ai eu peur.

$je me suis réveillée dans un sale état.

J’avais des frissons , déjà le soir avant.

Mais au matin j’étais transpirante.

Aucun thermomètre à la maison et aucun à la pharmacie.

Mais j’ai de la chance.

Vraiment, si il y a quelque chose que je sais de moi, c’est que j’ai de la chance.

J’ai dans ma vie, une Tatiana formidable.

Une demie-heure après m’être plainte sur Facebook d’être sans thérmomètre.

Elle en apportait un dans ma boîte aux lettres.

Avec d’autres surprises à l’intérieur.

J’ai pleuré, d’ailleurs.

Ensuite, j’ai pris ma température.

Un beau 36.5.

Je me suis senti toute de suite mieux.

Ensuite, j’ai compris pourquoi j’avais eu si froid.

Déjà qu’on n’a pas de chauffage..

en plus j’avais oublié de fermer une fenêtre.

Peut-être aussi qu’on se pose tous la question :

est-ce que je l’ai ?

Je crois qu’on se pose tout la question.

Après tout, les premiers symptômes ne sont pas si particuliers,

et peuvent être légers, avant  que la maladie évolue.

J’avais mal aux articulations aussi.

Mais pas de fièvre.

Et ce soir, pas de fièvre non plus.

Pas étonnant que j’aie mal aux articulations.

Quand il fait froid la nuit, le corps se contracte tout seul.

Ces derniers jours, je ne sais pas pour vous,

mais j’ai envie de croire que c’est le cas,

nous avons eu le temps de penser à ceux qui ont marqués nos vies.

Nous avons eu le temps d’explorer nos coeurs.

Nous avons eu envie de prendre de leurs nouvelles.

Cette saleté de virus a des tas d’inconvénients c’est vrai, mais

je crois qu’il va sauver des vies.

C’est une petite théorie qui m’est venu aujourd’hui.

Justement à cause de ce rapprochement imposé.

Bien sûr, je ne suis pas si naïve, il y en a qui auront de la peine à se supporter.

Mais il y en a d’autres.. c’est à eux que je pense :

d’autres qui étaient en train de partir à la dérive.

D’autres qui auraient peut-être mal fini,

si soudain, un virus atteignant le monde entier

ne les avait pas à nouveau rapprocher de ceux qui les aime.

Le soucis, quand on va mal, c’est de croire qu’on est seul  .

Alors qu’on s’ est enfermé tout seul dans sa propre solitude.

Quand des parents divorcent, quand un proche meurt, quand une amie s’en va pour toujours…. quand on fréquente des gens pour de mauvaises raisons.

quand les autres font mine de s’intéresser à vous pour de mauvaises raisons…

Mais voilà que se produit quelque chose de totalement inédit.

Quelque chose qu’aucun de nous n’a jamais vécu.

Quelque chose qui nous fait prendre conscience que notre santé est importante.

On le savait déjà, mais là, ce n’est pas pareil.

Il y a des morts, beaucoup de morts,

On ne parle plus que de ça.

Nos vies sont totalement chamboulées.

Et ça va durer.

Avant, on n’avait pas le temps.

Maintenant, on à plus que ça.

Du temps pour se regarder vraiment.

Pour se parler vraiment.

Alors , peut-être , sûrement, que ça va sauver des gens.

Juste quelques uns, par ci par là.

Des destins bouleversés.

Rien en comparaison de deux qui nous ont déjà quitté.

Mais on ne devrait pas comparer des vies humaines.

Allez savoir, parmi ces gens là, il y en aura peut-être un qui en sauvera beaucoup d’autres.

Chacun de nous est unique et irremplaçable.

Ce qui l’est tout autant, ce sont ces liens qui nous unissent.

Voilà  pourquoi , je me pose souvent des questions sur les autres, pourquoi je décortique leurs comportement pour chercher des réponses.

Mais je n’aime pas l’agressivité.

Même si ça m’arrive aussi.

Je n’ai pas envie de perdre mon temps à en vouloir à qui que ce soit.

CA n’en vaut pas la peine.

Puisque ce temps qui nous reste à pris davantage de valeur.

 

 

Facebook
Twitter
Email
WhatsApp

Laisser un commentaire