Le Temps… on a déjà tout dit sur lui.
Qu’il passe… et repasse.. qu’il efface les plis de la vie.
Qu’il arrange les choses…
Pour moi, le temps, c’est une enfant que j’ai vu, tout petit, et qui m’épate, 20-30 ans plus tard, parce que le petit machin mignon est devenu une belle jeune fille qui passe à la télé .
C’est mon fils, en qui j’ai toujours cru, qui progresse soudain, tellement que c’en est impressionnant.
Comme je suis contente de m’être fait confiance.
Comme je suis contente d’avoir pris ces décisions difficiles.
Le garder avec moi, ne pas lui donner de médicaments.
Me faire confiance.
Croire en mon instinct.
Instinct de mère, de femme pourvue d’un cerveau qui fonctionne parfaitement bien.
De ne faire confiance qu’à ceux qui confirmaient mes observations.
Et surtout, surtout, avoir conscience que chaque autiste est différent.
Que rien n’est inéluctable.
Que personne n’avait le droit de me dire ce qu’il fallait faire.
Que personne ne pouvait prétendre s’y connaître mieux que moi , à propos de mon fils.
Parce que je l’ai mis au monde , observé , analysé, tout les jours pendant plus de 20 ans.
Donc, non seulement je m’y connais dans cette forme d’autisme particulière
qu’est le syndrome d’Asperger, mais je suis l’unique spécialiste du cas de mon fils.
Grâce à cette confiance indestructible, ce que j’ai prédit, ce que j’attendais
c’est produit.
Comme un miracle, il faut le dire, tellement ses progrès sont impressionnants.
Je redis « impressionnant », parce que c’est le mot qui décrit précisement ce qu’il se passe actuellement.
Ceux qui le connaissent sont touchés..
Presque ahuris, mais si heureux de constater ses progrès.
Je savais qu’internet, les jeux en lignes, à l’excès, ne seraient qu’un passage.
Qu’il allait arriver à saturation.
Passer à autre chose.
J’étais prête si il le fallait à accepter qu’il ne puisse pas aller plus loin que le Denner en face de chez nous.
Mais là aussi, tout à changé.
Je ne rentrerai pas dans les détails.
C’est un adulte, maintenant.
Quelqu’un qui a droit au respect de sa vie privée.
Mais en tant que mère, je peux le dire, je suis fière.
Je suis passée par tellement d’étapes.
De moment si difficiles.
Lui aussi.
A certains moments, nous avons eu de la chance.
Trouver du soutien.
Et c’est ce que je veux retenir.
Sûrement même que ces années passées à nous défendre ont servi à quelque chose.
Sûrement, elles étaient indispensables.
Parce qu’elles faisaient partie du processus.
Il fallait passer par là.
Et quand je vois le résultat.
Aussi pénible, aussi horrible, aussi insupportable,
irracontable,
que c’était.
Nous l’avons passé.
Et ça valait le coup d’y croire.
Je veux le dire.
Je veux l’écrire.
Si une seule maman qui comprends de quoi je parle me lit :
sachez-le, Madame, qu’il y a de la lumière au bout du tunnel.
Sûrement même, que cette lumière ne peut pas venir si on ne passe pas par ces phases d’obscurité.
Et quand je dis obscurité, c’est une métaphore, qui me semble un peu faible.
C’est allé bien plus loin.
Je dirais que c’était carrément la nuit obscure, peuplée de démons qui brisaient ,avec haine, tout ce que j’essayais de construire de bien.
Tout ce qui m’appartenait et auquel je tenais devait être détruit.
Chaque sentiment positif, même , juste l’envie de chanter une petite chanson joyeuse,
étant proscrit, interdit.
Je ne sais pas comment, mais j’ai gardé la foi.
En moi, en lui, en l’Univers tout entier.
J’ai tenu.
Lui aussi.
Il est remonté centimètre par centimètre du gouffre dans lequel on nous avait précipité..
Ce « on » est nombreux.
Ce « on » est encore responsable du malheur de beaucoup de mères suisses.
Ces lois, qui devraient servir à protéger les enfants, et qui le plus souvent mettent les mères dans des situations intolérables.
Ces enquêtes, mal conduites, par des personnes tellement bien intentionnées,
que leur bonne volonté fait l’effet inverse.
Cette épée de Damoclès qui nous enlève notre liberté d’agir, de penser et de nous faire confiance.
Heureusement, tout le monde ne passe pas par là.
Alors, est-ce que c’est ce qui nous a rendu si forts ?
Si c’est le cas, alors, je ne regrette rien.
Quelque part dans un coin de ma tête, je persiste à croire que ces souffrances là, étaient inutiles.
En tout cas, je m’en serait bien passé.
Quand aux autres, celles qui sont typiques au comportement d’un Asperger,,,
et bien, je crois sincèrement maintenant, que si on arrive à s’y confronter,
alors, ça permet à ce qui est positif de se déclencher.
comme des sortes de phases d’apprentissage de se déclencher.
Il faut comprendre une chose, en tout cas,
Obliger un enfant autiste à se confronter à la société n »est pas une bonne idée.
C’est comme vouloir mettre des objets ronds dans des trous carrés.
Ce n’est possible que si on a de la marge.
Du temps.
De la confiance.
Du soutien.
Et de l’Amour, beaucoup, beaucoup d’Amour.
Tant pis pour le matériel.
Si on est capable de s’en détacher, alors tout sera plus simple.
Voilà pourquoi j’aime le Temps.