Tchüss Petra

L’histoire.

un jour Petra, dont j’ignorais le nom à l’époque, est passé devant mon stand.

Elle s’est arrêté un instant devant le tourniquet des cartes postales.

Celles que je fabrique avec mes photos.

Ca m’a marqué.

Elle n’avait pas l’argent pour la payer.

Mais elle était tellement enthousiaste.

Surtout, elle à instantanément compris le sens de mon travail.

Je fais ces photos pour montrer la beauté de ma , de notre ville.

Du coup, elle en à choisi une et m’a demandé de la garder jusqu’à ce qu’elle aie assez pour venir la chercher.

Quand  j’y pense, j’aurais pu lui offrir.

Mais ça aurait perdu de la valeur,

Ca, son geste d’acheter cette carte, malgré son peu de moyen,

parce qu’elle représentait sa ville, montré d’une façon qui lui plaisait.

Je suppose, en tout cas.

Donc, j’ai attendu et elle est revenu la chercher.

Il y a des gens pour qui, 5 francs, c’est déjà beaucoup.

Et quand ils les ont, ils ne s’achètent pas de superflu, ils comblent leurs besoins essentiels, d’abord.

Mais Petra, ce jour là, a choisi de se faire ce plalsir.

Ca m’a touché.

Ensuite, chaque fois que je la croisais, elle me reparlais de cette carte.

Des autres aussi, de mon travail qu’elle admirait.

C’est tout ce que je connais d’elle.

Mais Bienne est une petite ville.

J’ai su que, l’autre nuit, Petra s’en est allé.

Comme une bougie qui s’éteint, elle n’illuminera plus ma journée, par son enthousiasme.

Quand on est aussi sensible que moi, un bonjour un peu sec peut vous foudroyer.

Je préfère parler des mots qui font du bien.

Même si je ne la voyais que de loin, je repensais toujours à cet instant.

C’était tellement sincère, et gratifiant.

On n’a presque pas parlé.

ni ce jour là , ni les autres.

Parce que Petra est suisse-allemande .. était suisse-allemande et c’est une langue…disons un dialecte que j’avais, j’ai encore de la peine à maîtriser.

Sauf que, après presque 55 ans de stupide obstination, j’ai décidé de m’y mettre.

Chaque jour, je sors pour retrouver des amis qui s’expriment dans cette langue.

Des amis qui ne se moquent pas, des amis qui m’intègrent à leur conversation et ne sont pas rebuté par mes erreurs.

Et, vous savez quoi ? des amis qui constatent mes progrès, et m’encouragent.

Comme quoi, ma devise, ma vieille devise, est toujours d’actualité :

il n’est jamais trop tard pour bien faire.

Je ne dis pas que j’aurais pu être amie avec Petra, je ne peux pas le dire, et je ne le saurais jamais.

Mais j’aurais pu, au moins lui dire, le plaisir qu’elle me faisait, la motivation qu’elle me donnait.

 

Personne n’est parfait,

certaines personnes vivent derrière une sorte de barrière invisible que je connais bien.

Quand on a peu de moyens, quand on choisi, ou subi, une vie différente, on se retrouve derrière cette barrière.

Pas seulement éjecté dans la marge.

Cette barrière nous accompagne partout ou on va.

On prends l’habitude des regards méprisants, ou pire, indifférents.

Comme si on était pas tout-à-fait un être humain.

Comme si, il y avait de l’autre côté, une perfection que l’on atteindra jamais.

A tout réfléchir, cette barrière n’est pas forcément une question de moyens.

Les personnes que l’on a rabaissé, celles qui ont subit des épreuves si nombreuses, qu’elles en gardent des cicatrices insupportables.

Pour les autres, mais aussi pour eux-mêmes.

Cette barrière, je l’ai franchie.

Mieux, je l’ai démolie.

J’ai pu, j’en avais le droit, parce que c’était MA barrière.

Personne ne vous juge aussi durement qu’on le fait soi-même.

Maintenant je sais : il n’y a pas de raison.

Nous sommes de toutes façons différents.

Cela fait notre force, notre intérêt.

Glorifions nos différences, assumons les et acceptons celles des autres.

Le monde ne pourra que mieux se porter.

Tant que ça fait du bien, tant que ça permet de se sentir mieux, dans le partage, dans la richesse des relations avec les autres.

 

Voilà, Petra est partie.

Je lui souhaite tout le bien qu’elle était capable d’ apporter.

Dans la lumière d’un endroit qui n’a plus ni ombre, ni obscurité.