To Bi…enne or not to Bi..el ? (Bob Morane story)

Etre un biennois, une biennoise… une vraie de vraie, comme moi,est devenu au fil des ans,
de plus en plus, une fierté.
C’est vrai, quoi, rappelez-vous, les plus anciens : quand on allait à l’école.
Est-ce qu’on trouvait des autocollants qui exprimait notre biennitude ?
A la limite, il y avait notre équipe de hockey.
La c’est clair, on l’était, fiers, il y avait de quoi.
Des joueurs charismatiques. Olivier Anken en tête, une première place au championnat,
des traditions bien ancrées dans les matchs du soir, avec nos écharpes rouges et jaunes.
Même les garçons en tricotaient à l’école.. c’est dire.
Et chaque fois que Bienne marquait un point, j’avais droit à mon bisous.

Etre biennois, ça se mérite.
Mais tout le monde peut l’être, sans même avoir vu le jour ici.

Il y a deux conditions essentielles :
1) Habiter à Bienne.
2) aimer Bienne.

La petite 120-aine de nationalités qui se côtoient face au lac est tout à fait capable de s’entendre.
Quelque soit l’heure ou l’endroit de la ville ou je me trouve, je me sens toujours en sécurité.
Même sans mon chien.

J’aime la beauté de la ville avec son architecture variée.
Ses sculptures de façades anciennes, ses grilles de balcon en fer forgé.
J’aime les quais, celui du bas, celui du haut.
Je les imagine en été, avec des stands de livre, comme à Paris.
Pour beaucoup, Bienne est un petit Paris ; international et chauvin en même temps.

C’est possible, venez voir .

La jeunesse ici, est toujours à la pointe des tendances.
Toutes les tendances.
Musique, sport, mode…
Les enfants vont en classe ensemble, dans un joyeux mélange de couleurs.
Les familles sont parentales, mono-parentales, reconstituées.

Tout est normal.

A mon époque, dans ma classe, il n’y avait qu’un seul enfant issu d’une famille divorcée.
Une de mes copines avait pleuré en l’apprenant.
Aujourd’hui, tout à tellement changé.

Oh, je sais bien que le mal existe.
La violence, l’injustice et la bêtise n’épargne aucun coin du monde.
C’est la part sombre de l’être humain, l’autre côté de la pièce.
Ici comme ailleurs.
Mais ce n’est pas mon sujet.

Je veux regarder ce qui est bien, bien à Bienne.

Ma ville chérie.
J’espère , je veux le croire, qu’elle va encore évoluer, montrer l’exemple en matière de tolérance et respect de chacun.
Il reste du boulot.
Nous sommes en 2021, et pourtant, pour les femmes, pour les personnes dont la différence ne s’affiche pas forcément, mais qui existe pourtant,
Il reste des souffrances injustes que l’on pourrait gommer à coup de compréhension, d’adaptation.
Face à elles, certains s’engagent dans la lutte.
Personne ne devrait être exclu pour sa différence.

Mais il y a pire que l’exclusion, il y a l’indifférence.

L’autre jour, je m’en suis assez vanté sur ma page Facebook, j’ai sauvé un petit bébé cygne.
J’étais là, au bon moment, au bon endroit.

Je n’étais pas seule au début : il y avait deux personnes avec moi pour s’inquiéter du sort de cet oisillon.
Mais elles ne pouvaient rien faire d’autre, parce qu’une avait des béquilles et l’autre s’en occupait.

En tout premier j’ai pensé à mon amie Christa, qui connait si bien les moeurs des animaux de notre région.
Si j’avais eu mon telephone je l’aurais appelé tout de suite pour lui demander conseil.
Mais voilà….

Au moment de récupérer Boby (mon petit aventurier Bob Morane), j’étais en face d’un restaurant.
Un genre de restaurant, pour personnes aisées, qui se la pêtent au bord de la rivière, conscients
d^’être privilégiés.
Le verre à la main, la clope dans l’autre, ils devisent, le cul posé à moitié sur les pierres taillées,prenant l’apéro… c’est leur droit.
J’espérais… sur la vingtaine, alors que j’étais juste en face, qu’au moins une personne s’intéresserait à ce qui se passait sur le rivage en face.
Parce que là ,à ce moment, j’étais seule.

J’avais suivi Boby jusque sous le pont, et de l’autre côté , il avait trouvé une sorte de cavité ou s’accrocher.

Boby avait 2 jours de vie.
C’était sa toute première promenade sur la rivière avec sa famille.

Mais Boby, il est différent.
Ce n’est pas un suiveur dans l’âme.
Je voyais bien , en l’observant au début.
Sa curiosité, pour toutes les choses nouvelles .

Il semblait en retard sur les autres, parce qu’il avait du mal à suivre.
Mais en réalité, c’est son enthousiasme qui le freinait.
Ajouté à un courant plutôt fort.

Tandis que ses parents remontaient la rivière,
longeaient les bateaux amarrés tout du long,
ils se sont perdus de vue.

Il est resté en arrière.
Picorant les insectes collés sur le bateau.
Un bateau à la coque si lisse qu’il voyait son reflet.
Un reflet qui picorait en même temps que lui.
Ca l’intriguait, et plus que ça.
Ca l’excitait au point de rester là, tout du long, à picorer et à foncer
sur son reflet.

Les parents cygnes sont très attentifs avec leurs enfants, d’habitude.
Mais , dans la nature, des crétins d’humains qui croient bien faire en leur lançant du pain…
eh bien, ce n’est pas naturel.
Ils adorent ça… manger c’est vital.
Quand arrive l’aubaine, ils y vont et c’est tout.

Les 4 autres ont suivi. Traversant la rivière et le courant, avec leur parents abandonnant le 5ième enfant.
Et les lanceurs de pain, qui habitent de l’autre côté du nid, qui installent des pontons à oiseaux, et les nourrissent, n’ont même pas remarqué qu’en faisant ça, ils étaient en train de déranger la nature.
que sur les 5 bébés il en manquait un.

La rivière est large, fait du bruit, même si j’avais crié, je ne sais pas si ils m’auraient entendu.
alors, les petits piou piou désespérés de Boby n’avaient aucune chance.

IL ne voyait plus ses parents.
Le courant l’emportait, loin, de plus en plus loin.
De plus en plus fort.
Jusque de l’autre côté du pont.

Alors, je suis d’accord, moi aussi je ne suis pas sensée intervenir.
Mais je suis la nature aussi.

Comme ces crétins de lanceurs de pain.
Comme les buveurs d’apéro,
comme la dame avec ses béquilles qui s’inquiétait, mais n’arrivait, elle non plus, pas à suivre.

Irrémédiablement, le petit se distançait de ses parents.
Et j’ai eu ce sentiment ;
dan la nature , seuls les plus forts survivent.
Est-ce que cette première promenade est un test ?
Et les parents ne gardent que ceux qui peuvent suivre ?
Et dans ce cas, comme une maman chat qui voit qu’un de ses chatons ne tête pas, elle l’écarte et le laisse mourir.

Si j’écris tout ça, ce n’est pas pour qu’on me dise : bravo, tu es super etc…
Mais pour raconter la connexion qui s’est faite entre un être humain et un bébé cygne,
qui serait resté avec ses parents, si d’autres être humains ne les avaient pas distrait avec leur f…u pain.

Sur le moment je n’ai pas pensé à grand chose.
Dans mes souvenirs, reste Micro, le bébé foulque de l’année passé,
les rats qui tournaient autour du nid et qui ont mangé sa petite soeur.
Au même endroit.
Et Boby, qui comprends qu’il doit s’arrêter, trouve des cailloux pour grimper,
juste à l’entrée des galeries des rats.

Dans un coin difficile d’accès pour les humains et même pour un gros cygne.
Si un rat était arrivé juste à ce moment.. je n’ose pas y penser.
Ils n’ont pas peur des humains, leurs morsures sont terribles.

Je voyais les paddleurs, qui descendent la rivière.
J’espérais qu’a l’aide de leur rame, ils pourraient m’aider à sauver Boby.
Je cherchait une branche aussi, mais à cet endroit, on en trouve pas.
Je cherchais quelqu’un, et je paniquais en même temps.

Juste en face, le restaurant.
Et l’indifférence la plus totale.
Même pas un peu de curiosité.
Que dalle.
Pourtant, il n’y a qu’un pont qui nous sépare.
Le traverser pour venir aider aurait pris 1 minute.
A condition de le vouloir…
1 minute c’est déjà bien plus de temps qu’il n’en faut à un rat pour choper un poussin.
Donc pas de branche, pas d’aide, et Boby qui s’enfonçait dans la galerie, au point que je le le voyais plus.
Je l’entendais encore à peine, appeler ses parents .
Il fallait que j’entre dans l’eau et que j’aille le chercher à tout prix.

Mais si l’entrée des galeries est trop petite pour un gros cygne, elle l’est aussi pour moi.
J’enlève mon appareil photo, et mon pull.
Et je l’appelle.

Bébé! viens bébé!!
Je ne le vois plus.
Mais je suis désespérée aussi, alors je continue.
Je me dis que je suis une maman aussi.
Donc je l’appelle comme une maman appelle son petit.
Je trouve un mini bout de bois pour attirer son attention.

Et je continue ; bébé! viens bébé!!
Ca dure un moment.

Jusqu’au miracle de la Nature.

Bébé me voit.
Bébé me regarde.

Il n’a qu’une solution pour sortir de là,
c’est remonter sur le cailloux devant la galerie,
comprendre que je veux l’attraper.
Mais pour ça, il doit se jeter à nouveau dans le courant.

Justement ce qu’il essayait de fuir.

Vous comprenez ‘
Il a du me faire confiance.

Je l’ai vu dans ses yeux de bébé.
Comme un enfant qui se jette dans le vide,
et qui n’a pas peur,
parce qu’il sait que maman est là.

A partir de là, tout c’est passé très vite.
Je DEVAIS faire très vite.

Plouf, bébé plonge dans le courant.
En une seconde il est déjà vers moi.
Et je le chope avec ma main, pour être sure de ne pas le louper.
Je n’aurai peut-être pas de deuxième chance.
Et je ne veux pas l’envelopper dans un pull trempé.
Je le chope en entier.
Avec son duvet, il à l’air assez gros, mais il tient dans la main.
Et je l’enveloppe tout de suite dans mon pull.
En cachant les yeux.

Parce que je sais que les oiseaux se tiennent tranquilles quand ils ne voient rien.

Tandis que je cours le long de la rivière, je vérifie que je ne l’étouffe pas.
Le petit bec noir ressort, tout est bien.
Je fonce jusqu’à la hauteur de l’endroit ou je vois ses parents.
Et la… ils sont de l’autre côté.
Malgré le pont, je ne peux y accéder.

Parce que les lanceurs de pains, en plus d’être stupides (tout les lanceurs de pain ne le sont pas, mais ceux-ci… ils font fort), en plus d’être stupide donc, ont privatisé ce coin de rivière.
Avec une grille et une porte installées à leurs frais, qui ferme à clef.
Ce qui est totalement interdit, mais je ne suis pas là pour parler d’eux…
Donc je n’ai pas le choix.

Cette fois, c’est les parents que je dois appeler.

Ils sont en train de remonter la rivière, dans le sens inverse, celui qui s’éloigne de l’endroit ou leur
bébé se trouvait.
Il n’y a plus de ponts, pas de voiture, donc moins de bruit.

Ils ne vont pas vite, heureusement, ils longent les bateaux en picorant les insectes.

Alors…
Je les appelle :
Papa,Maman !
Je m’adresse à eux, vraiment.
Comme un être à un autre être.
Humain ou animal quelle importance!?
Pour moi nous sommes égaux.

Et nous sommes biennois.

Nous n’avons pas besoin de parler la même langue pour nous comprendre.

Et là, je vous assure ; le père me voit.

Il me regarde du haut de son long cou, tourne sa tête vers moi.
Je m’avance le long d’un petit ponton à bateau pour être plus près.

Mais pas beaucoup plus près.
A rivière est large à cet endroit.

Et j’avoue, j’ai très peur de me faire attaquer.

Les parents cygnes n’aiment pas du tout qu’on touche à leurs enfants.
En général, à peine on les approche, ils sifflent déjà et se montrent menaçant.
Un cygne à une grande force dans les ailes.
Il suffit de cliquer sur « attaque de cygne » pour voir les exemples filmés même, de parents cygnes attaquant des humains, alors qu’ils essaient de sauver leur petit.

Au moment ou le père me voit, j’ai quelques millièmes de secondes pour relâcher Bébé Boby et me reculer.
En espérant que son père continue de ragarder.

Et ma préoccupation première c’est que le courant ne l’emporte pas avant que son père arrive.

Donc j’appelle le père, , il me voit.
Je déroule mon pull qui entoure bébé.
Directement dans l’eau, sans le toucher.
Sans précaution non plus, parce que j’ai peur là, quand même…

Je me recule très vite.
En espérant que la suite se passe bien.

Sur le moment, je n’ai pas trop pensé aux conséquences.

Je sais très bien que j’aurais pu me faire attaquer,
mais d’un autre côté. ma connaissance des cygnes n’est pas assez grande pour prévoir la réaction du père.
Eh bien voilà.
Peut-être que mon expérience peut servir, c’est pour ça aussi que je raconte mon histoire.
Je l’ai posé, ou plutôt jeté à l’eau très vite, petit Bébé.
Et je me suis reculée, donc.

Papa à traversé la rivière.
Pas comme un cygne en colère qui viendrait protéger son petit.

Non, pas du tout.

D’ailleurs, j’ai la preuve, sur la photo.
En le voit arriver tranquillement.
Et reconnaître son poussin.
Poussin qui lui aussi reconnaît son papa.
J’ai ce regard entre eux.

Je ne sais pas ce qui se passe dans la tête d’un cygne.

Il se sont regardés quelques secondes.
Papa et son bébé.

J’ai même pensé un instant qu’il n’allait pas le reprendre.
Je ne l’avais pas touché plus qu’une demi seconde, mais peut-être l’odeur de mon pull…
je ne sais pas.
Je ne sais pas parce que les gens qui ont touché un bébé cygne en présence de leur parent,
se font généralement attaquer.
Mais pas là.

Aussi tranquillement qu’il était venu, Papa est reparti avec son enfant.

Ensuite tout le monde est revenu vers le nids.
Et comme les petits se ressemblent, je n’aurais pas su dire ou était bébé Boby!

La mère s’est installée sur le rivage,
et lorsque je me suis approchée un peu plus pour faire une photo,
elle m’a « pchitté » copieusement, en mode « approche pas de mes bébés ».

Le père lui, n’a rien dit.

Alors je suis partie.

Heureuse.

Et plus tard, lorsque je suis revenu pour les compter.
Petit Boby l’aventurier, suivait bien sagement sa maman
en compagnie de ses frères et soeurs.

Cette après midi il auront trois jours de vie.
Je retournerai voir comment ils vont.

Conclusion ;
Pour que mon histoire serve à quelque chose, voilà ce que je conseille si vous voyez un petit cygne en danger :
-Si il est coincé quelque part , et que vous avez la possibilité de le faire, appeler plutôt le service de protection adéquat. Ou la police qui vous transmettra le numero.
Comme je n’avais pas de téléphone, et que j’étais seule, je n’ai pas pu, le danger était immédiat (les rats) et les parents trop loin pour me voir.
Mais en règle général, il faut absolument éviter d’approcher trop près les bébés cygnes, surtout si les parents peuvent vous voir.