Biennoises masquées

Quelle drôle de période on vit.

Plus que ça.

Ce sont des temps historiques.

2020 Année du virus.

Il y en a encore à espérer que ça s’arrête.

Je fais partie de ceux qui pensent que notre vie, telle qu’elle était avant, ne reviendra pas de si tôt.

Je ne vais pas sur internet consulter les docteurs « qui savent ».

Je ne connais pas les chiffres.

Tout ce que je constate, c’est l’air de la rue.

Ce que nous ne pouvons plus faire.

Les masques, les câlins désormais proscrits …

La police à la gare qui vérifie nos masques.

Les vendeuses dans les magasins qui nous font signe de le mettre.

Je n’ai pas encore ce reflex.

Par contre, je mets ce que je fabrique.

Mon porte-masque.

Je les ai bien vendu, ce samedi au marché.

Non seulement ceux qui m’en ont déjà pris , qui reviennent en chercher pour les offrir, ou prennent les commandes des copines, mais aussi ceux qui l’ont découvert sur mon stand, et compris comme il était utile.

Ca me fait bizarre de fabriquer un objet qui m’existait pas avant.

PArce qu’on en avait pas besoin.

Mais là, en voyant tout ces masques perdu, par terre,

ces masques trop grands qui glissent, je m’étais dit que je pourrais en faire.

Mais voilà, des idées, j’en ai 10 à la minutes… et je ne m’y suis pas mise tout-de -suite.

Ensuite, Flo est passée sur mon stand, exprès pour m’en parler.

Flo, elle sait être convaincante.

C’est déjà elle qui m’a fait prendre conscience que je devais penser aux autres.

Aux personnes à risque.

Celles qui tremblent de peur, et de rage, en voyant l’indifférence des autres.

Celles qui trouvent injuste d’être confinées par peur d’être contaminées par les rebelles non-masqués.

Alors que faire un peu attention, même juste par précaution, à ceux qui nous entourent, ça devrait être la moindre, non ?

Une question de respect.

Et puis, il y a les autres, ceux qui ne le supporte pas, ce fichu masque.

Par phobie, idéologie, et parfois pour les deux.

Les complotistes de tout bords.

Revenons un instant sur les phobiques : ceux qui étouffent à la simple vue d’un masque, ou parce qu’il y a différents degrés d’atteintes,

ceux qui ne peuvent le porter que quelques minutes avant que ça devienne insupportable.

J’en connais et ça me désole pour eux.

Ca me désole qu’ils craignent de perdre leur travail si ils en parlent.

C’est injuste.

Ils se retrouvent dans la même situation que les personnes à risques , si ils ont un certificat médical :

ils risquent de perdre leur travail.

J’ai même entendu quelqu’un me dire ces paroles de son chef : tu as un certificat médical ? t’as qu’à rester à la maison.

Il me semble que nous devrions prendre soin les uns des autres.

Faire preuve de compréhension.

Accepter nos différences.

Chercher comment s’adapter.

D’autant que c’est justement cette faculté d’adaptation qui nous défini,

nous, les êtres humains.

J’ai envie d’embrasser ma mère.

Mais je vais m’abstenir désormais.

Même masquée.

Curieuse mère, qui écoute le professeur Duschnock… qui est contre le port du masque,

mais qui se raidit quand on l’approche.

Il y a notre têtes,

et il y a nos tripes.

Mais surtout,

il y a notre coeur.

On devrait harmoniser les 3.

Etre compréhensif, à l’écoute.

Je fais aussi partie de ceux qui pensent

que le port du masque ne réduit pas la communication.

Au contraire.

Elle la développe par les yeux.

Et si nous étions aveugle, alors notre écoute

grandirait.

Sourds ? notre toucher.

Et même privé des 5 sens, nous resterait encore le plus grand :

Le 6 ième.

Celui que nous possédons tous, que nous utilisons sans faire attention,

mais qui nous serait tellement utile,

si nous y faisions plus attention.

Comme si nous avions tous un super-pouvoir que nous négligeons, pour la plupart.

Pourtant : nous « sentons », en bien ou en mal ce qui nous entoure.

Et pour les plus sensible, nous appréhendons,

à l’avance, les événements.

J’avais compris ça grâce aux Touaregs, et tout ce qui se disait, le soir , autour du feu :

sans en mot, rien qu’avec les yeux.

Ca va loin… au point de me faire changer d’avis sur certaines personnes.

Comme ce jeune homme, perpétuellement en colère.

Une fois masqué , je ne voyais plus que la bonté de ses yeux.

C’était , pour moi, une magnifique journée, celle de hier.

Bien sûr, je regrette de voir certaines de mes amies aussi fatiguées de lutter.

Mais elles sont passées.

Et toutes, elles m’ont pris un porte-masque.

Et moi, je suis heureuse d’avoir créé cet objet, qui va les accompagner et leur faciliter, un peu, la vie.

L’embellir un petit peu aussi.

En rajoutant un peu de personnalité à leur visage.

Ca me fait tellement plaisir, quand, au milieu des autres, une personne reconnaît celui qui est fait pour

elle.

Ou pour lui.

Je les fait de toutes les couleurs  et épaisseurs, avec des pierres mêmes.

Ma prochaine collection sera comme ça.

Avec des pierres.

Et vous savez, le prix que je demande, ne couvre pas vraiment mon travail.

Entre le prix des perles, des fermoirs et la demie-heure minimum de boulot.

Je devrais les faire à 50 frs.

Au début, je les ai donné pratiquement, à 10 francs, pour me faire connaître.

Mais il est vite devenu évident avec leur succès que je ne pourrais pas tenir comme ça.

La plupart des gens comprennent que 20 francs est un prix plus qu’honnête.

Alors, ils resteront à 20 francs.

En moyenne.

Je n’utilise que des matériaux de première qualité.

Mes perles sont en verre,  en pierres ou en cristal.

Désinfectable et très solide grâce aux deux  fils de pêches.

Je privilégie les grands fermoirs qui sont plus résistants.

Mais j’en ferai aussi des petits pour ceux qui préfèrent la discrétion.

J’en fait des fins et des plus épais.

Et j’ai une quantité de sortes et de couleurs de perles que je peux mixer à l’infini.

J’ai de nouvelles commandes tout les jours.

Alors je vais me remettre au travail.

Mais d’abord, je vais manger, faire mon ménage, et m’aérer.

J’ai aussi du travail de photo.

Et de l’administration ( ce que je déteste par-dessus tout ).

Malgré, et peut-être même à cause du virus, j’aime ma vie.

J’aime avoir ma place, être utile, apporter quelque chose.

Et j’aime ma famille, mes copines, mes animaux .

Hier soir, ma voisine du dessous est venu râler pour un petit caca de chat devant sa cave.

Après ça, elle à des invité, et joyeusement ils se sont passé le virus, pendant qu’on peut encore… avec la musique si fort que je n’entendais plus la télé. Tandis que son étage est couvert d’ordure..

J’avais envie de lui dire qu’au moins mes chats avaient l’excuse d’en être.. des chats…

La bêtise et l’égoïsme de certains humains, comme la connerie donnent une idée de l’infini…

Mais qu’importe, je ne perdrai pas une goutte de salive, ni mon énergie si précieuse à entrer en guerre.

Je préfère penser à mes copines, à leur lumière,

celle qu’elles projettent sur moi quand je les vois ,

qui leur donne l’impression que je suis formidable ; alors qu’en fait,

c’est elles qui le sont.